Actions au Sénat - Intervention en séance
Débat sur la Solidarité
internationale.
27
Octobre 2005
M. le
président. J'indique au
Sénat que, compte tenu de
l'organisation du débat décidée par
la conférence des présidents, les
temps de parole dont disposent les
groupes pour cette discussion sont les
suivants :
Groupe Union pour un
mouvement populaire, 47 minutes ;
Groupe socialiste, 32
minutes ;
Groupe Union
centriste-UDF, 14 minutes ;
Groupe du
Rassemblement démocratique et social
européen, 9 minutes.
Dans la suite de la
discussion générale, la parole est à
M. Philippe Nogrix.
M.
Philippe Nogrix. Monsieur le
président, madame la ministre, mes
chers collègues, tsunami, cyclones,
tremblements de terre, attentats :
l'actualité récente a, hélas !
multiplié les occasions d'intervention
à l'étranger des citoyens, des
collectivités locales et des pouvoirs
publics français.
Ces événements ont
marqué l'opinion publique et soulevé
des élans de générosité sans
précédent dans notre pays. Aux dons
privés se sont associées non seulement
les actions de l'Etat, mais aussi celles
des collectivités locales.
Or, comme l'ont très
bien expliqué l'auteur de la
proposition de loi et le rapporteur,
c'est dans un cadre juridique
aujourd'hui incomplet et incertain que
les collectivités décentralisées
interviennent à l'occasion d'actions
humanitaires ou d'aide au
développement. C'est pourquoi, comme
l'ont fait mes prédécesseurs, je salue
l'initiative de notre collègue Michel
Thiollière, qui, par la présente
proposition, entend clarifier le cadre
juridique de la coopération
décentralisée.
Cette dernière
dépasse l'horizon de l'aide
humanitaire. Phénomène ancien, la
coopération décentralisée est
aujourd'hui très développée et très
diversifiée. Elle représente des
montants financiers qui, sans peser sur
l'équilibre des finances locales, sont
loin d'être négligeables. Les chiffres
ont été rappelés : les sommes
consacrées par les collectivités
territoriales à l'action extérieure
sont estimées à 230 millions d'euros
l'année dernière. Elles concernent
tant des actions de coopération
Nord-Nord que des actions de soutien aux
pays les plus démunis.
Se pencher sur les
règles régissant la coopération
décentralisée impose de s'interroger
sur le partage de compétence entre l'Etat
et les collectivités locales en
matière internationale. Dans un Etat
unitaire comme la France, l'action des
collectivités locales à l'étranger
est en principe résiduelle. Dans notre
droit, le principe fondateur est que
l'action internationale des
collectivités constitue un mode
d'exercice de leurs compétences et non
une de leurs compétences spécifiques.
Ce principe général
et fondateur se heurte à la nécessité
de plus en plus pressante d'approfondir
la décentralisation dans ce domaine. Il
est aussi nécessaire de mettre en place
un cadre juridique clair et en accord
avec la réalité de l'intervention
internationale des collectivités. Comme
l'a rappelé Mme la ministre, il faut
que la France soit présente et toutes
nos actions, y compris celles des
collectivités territoriales, doivent
toujours être en harmonie et en
cohérence avec l'action poursuivie par
le Gouvernement.
La proposition de M.
Michel Thiollière est équilibrée au
regard de ces impératifs
contradictoires. Elle n'entame pas les
prérogatives régaliennes de l'Etat et
permet clairement aux communes de mener
des actions « d'urgence en cas de
catastrophe humanitaire » sans se
heurter aux aléas de la jurisprudence
administrative, laquelle impose que
toute intervention à l'étranger
présente un « intérêt local » pour
être légale.
Si la proposition de
notre collègue a le double mérite de
susciter le débat qui nous réunit
aujourd'hui et de porter une
clarification nécessaire, sa première
version était trop partielle. Mais, au
Sénat, nous avons l'habitude d'enrichir
les textes qui nous sont proposés ! Il
en est ainsi des modifications
apportées par la commission des lois.
Elles nous semblent très opportunes et
nous vous en remercions, monsieur le
rapporteur.
Tout d'abord, la
première mouture de la proposition de
loi ne concernait d'abord que les
communes et leurs regroupements.
C'était négliger l'intervention des
départements et des régions. Cette
dernière est quantitativement moindre
que celle des communes, mais elle
demeure importante. En 2004, par
exemple, elle a représenté 40 % de
l'aide au développement engagée par
les collectivités françaises au profit
des pays du Sud. La proposition de loi
devait, à notre avis, être élargie à
toutes les collectivités, comme l'a
fait la commission des lois.
Ensuite, il était
important de viser tant les opérations
relatives aux catastrophes humanitaires
que celles qui ont trait à l'aide au
développement, quitte à assouplir les
conditions d'intervention en cas de
catastrophe humanitaire si l'urgence le
justifie. C'est ce que propose la
commission des lois et c'est une bonne
chose.
Enfin, et cela nous
tient à coeur, la proposition
originelle limitait à 1% des recettes
d'investissement les dépenses engagées
par les communes en matière de
coopération décentralisée. Outre le
fait qu'une telle disposition incitait
à l'endettement, elle me paraissait
contraire au principe organique
d'autonomie financière des
collectivités locales, qui en ont assez
des tutelles ici et là. La dernière
vertu de la proposition de notre
commission des lois est donc d'éliminer
toute limite de dépenses. Les
collectivités locales doivent être à
même de gérer librement leur budget,
ce qu'elles démontrent chaque jour.
Pour toutes ces
raisons, le groupe UC-UDF votera la
proposition de M. Michel Thiollière,
telle qu'elle a été améliorée par la
commission des lois.
En effet, la présente
proposition est un pas significatif dans
le sens d'une plus grande sécurité
juridique en matière de coopération
décentralisée. Toutefois, nous ne
ferons sans doute pas l'économie, à
l'avenir, d'une simplification - terme
que l'on aime beaucoup, mais que l'on a
du mal à mettre en pratique ! - ni
d'une refonte de l'ensemble de
l'architecture des règles qui
régissent cette matière. Les outils
juridiques se sont empilés au fil des
ans, sans toujours répondre aux besoins
des collectivités territoriales, comme
le souligne l'excellent rapport de notre
collègue de l'Assemblée nationale M.
Michel Hunault.
En attendant, il me
reste à féliciter M. Michel
Thiollière de la pertinence de sa
proposition, ainsi que la commission des
lois, en particulier son rapporteur, M.
Charles Guené, et son président, M.
Jean-Jacques Hyest, de l'excellence de
leur travail.
(Applaudissements
sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP,
ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
Pour
lire l'intégralité du débat, cliquez
ici
(Disponible sur le site du Sénat).
|