Activités
Sénat
Commission
des affaires étrangères
Des
soldats français sur le sol afghan
Répondant
aux exigences répétées du Président
George W.Bush, Nicolas Sarkozy décide
unilatéralement et sans consultation
préalable du Parlement, d'envoyer un
bataillon de militaires Français sur le
sol Afghan ; lesquels viendraient
s'ajouter aux 1900 soldats actuellement
en opération sur le terrain. Le
Président Français l'a donc confirmé
au sommet de Bucarest. Il s'agit d'un
" bataillon ",
c'est-à-dire environ 700 militaires,
soit un peu moins que le "millier"
de soldats que le chef de l'Etat avait
annoncé la semaine dernière à
Londres.
La
décision précipitée de Nicolas
Sarkozy est sujette à controverses. Il
n'a pas choisi de légitimer son action,
le Parlement regrette cette
non-consultation. Il faut cependant
savoir que la Constitution permet au
Président Français d'agir de la sorte.
En vertu de l'article 15 de la
Constitution de 1958, " Le
Président de la République est le chef
des armées ".
Le
fait d'envoyer un nouveau contingent
militaire est, de plus, très discutable
; Nicolas Sarkozy, n'en voyait pourtant
pas l'utilité lors de sa campagne
présidentielle.
Afghanistan
: de lourdes interrogations
Tribune
du 3 Avril 2008.
La
France va renforcer sa présence en
Afghanistan.
Le
Président de la République vient de
l'annoncer. On peut regretter que le
Parlement ait été placé devant le
fait accompli. D'autant plus que cette
décision n'est pas anodine.
Depuis
2001, la France participe à
l'opération menée en Afghanistan, par
l'OTAN sur mandat de l'ONU, contre Al
Qaïda et les talibans. Cependant, sa
participation est bien moindre que celle
de nos voisins anglais ou allemands.
Aujourd'hui, 1700 soldats français sont
déployés en Afghanistan, sur un total
de 60 000 hommes.
Ce
seront 700 soldats français
supplémentaires qui y seront envoyés.
Autrement dit, la France va augmenter sa
présence de plus de 40 %.
C'est
une inflexion lourde de
conséquences.
Des
conséquences humaines d'abord. En
Afghanistan, les troupes sont
confrontées à une véritable guerre.
La vie des hommes est en jeu.
Des
enjeux budgétaires ensuite : cet envoi
pourrait faire exploser le budget des
" opérations extérieures
".
Enfin,
l'enjeu est géostratégique : une
inflexion majeure des positions
françaises sur la scène internationale
semble se dessiner par-delà la seule
question afghane.
Au
regard de ces trois enjeux, les tenants
et les aboutissants du renforcement de
la présence française en Afghanistan
n'apparaissent absolument pas
clairement. Là est le problème.
Pourquoi envoyer 700
hommes supplémentaires ? Cette
décision ne correspond pas à une
demande de nos alliés. La France agit
de manière unilatérale.
Alors quel est
l'objectif ?
Pacifier le
pays et lutter contre le terrorisme,
dit-on. Oui, mais alors, les spectres du
Vietnam ou de l'Irak ressurgissent :
depuis 7 ans que nous sommes là-bas,
les choses se sont-elles améliorées ?
Non. Le conflit paraît s'enliser. Le
seul moyen pour réussir la transition
de la guerre à la paix réside dans le
développement et la reconstruction.
Mais, la France jouera-t-elle cette
carte ? Pas sûr du tout. Si son
contingent d'hommes augmente, en
revanche, ce ne semble pas être le cas
de son aide financière.
Etait-il
opportun, dans ces conditions, d'envoyer
ces 700 hommes supplémentaires ? Ce ne
paraît pas être le cas pour plusieurs
raisons.
Premièrement,
des raisons logistiques. Où trouver les
soldats requis ?
Deuxièmement,
cette décision pourrait compromettre
les autres engagements que nous avons
pris auprès de nos alliés de pouvoir
déployer des troupes en cas de crise
urgente.
Troisièmement,
la raison budgétaire : 700 hommes de
plus, ce pourrait être 50 millions
d'euros supplémentaires sur un poste
" opérations extérieures "
qui a déjà explosé. Où sera trouvée
cette somme ?
Une
seule raison paraît vraiment justifier
la décision présidentielle : elle
entre dans le cadre d'une inflexion
majeure de notre positionnement
géostratégique. La France se serait
engagée dans un profond "
glissement atlantiste ". Pour
preuve : les 700 soldats français
supplémentaires seront déployés dans
l'Est de l'Afghanistan où a lieu la
guerre contre les positions
frontalières d'Al Qaïda, auprès des
troupes US.
Ainsi,
toutes les interrogations que nous avons
évoquées aboutissent à des questions
plus fondamentales : jusqu'où ira le
glissement atlantiste de la France ?
Qu'en penseront nos partenaires
européens ? N'était-ce pas le moment
de reparler d'engagement concerté ?
Autant de questions qui restent sans
réponses.

Soldat
en opération

|